Raymond Dutertre maquisard au Maquis de Plainville: propos recueillis à chaud par la journaliste, à l’issue de la commémoration
au monument aux morts lors de la cérémonie
des 80 ans de la Libération de Nogent-le-Rotrou,
par les maquisards de Plainville, dont il a été membre
« Il fallait bien qu'on fasse notre petite part… » l'humilité de Raymond Dutertre, 80 ans après la Libération de Nogent-le-Rotrou.
« Je n'aime pas trop m'exposer ... »
sourit-il, pudiquement...
Raymond Dutertre, qui fêtera ses 99 ans dans quelques jours, était l'objet de toutes les attentions et les regards, ce dimanche 11 août 2024. Raymond Dutertre est le dernier d'entre eux.
Le Chant des partisans retentit crescendo devant le monument aux morts, faisant taire les dernières conversations. Les visages prennent tout à coup une expression solennelle, dans la foule confidentielle qui a trouvé l'ombre sous les arbres, bordant la sculpture, laissant aux officiels, s'y tenant droit comme un “i”, la place de la République, inondée d'un soleil de plomb.
À quoi pensait Raymond Dutertre en entendant cet hymne de la Résistance ? Brassard bleu, blanc, rouge, orné d'une croix de Lorraine, ce matin il s'est glissé parmi les porte-drapeaux.
Un héros en son pays natal: Ces hommes sont considérés comme des héros par les rares habitants, présents à la cérémonie.
« Nogent est une des seules villes à s'être libérée elle-même », vante son ancien maire, Harold Huwart, qui a laissé la place à Jérémie Crabbe, fin juillet, après avoir été élu député, quelques jours plus tôt lors des législatives anticipées.
« Raymond est aussi un des rares à avoir prédit ma victoire », s'amuse-t-il, devant ce vieux compagnon de route de sa famille.
Silhouette familière des cérémonies, depuis des lustres, le nonagénaire était l'objet de toutes les attentions, certains voulant poser avec l'ancien résistant, acteur direct de cette Seconde Guerre mondiale.
« Elle me fait plaisir cette photo », ne peut retenir Claude Jeay, le sous-préfet de l'arrondissement, attendri devant la valeur de cette rencontre.
« On y pense toujours, aux autres »
S'il s'est prêté au jeu, Raymond Dutertre, tout en humilité, ne perdait pas de vue le sens du rendez-vous: Honorer les Absents!
« On y pense toujours, aux autres... Au maquis, on était par groupes, des groupes de gens du même bled, du même hameau... On vivait ensemble, on couchait sur la paille... »
C'est au pied du pire que des liens, indéfectibles dans sa mémoire, se sont tissés.
Quelques bribes de cette fraternité dans l'horreur sont racontées par Constance et Jules, chargés de lire le témoignage d'André Duclot, résistant (alias Belleau), qui a également participé à la libération de Nogent.
« C'est un honneur », ressent la jeune fille. « C'est émouvant et c'est une responsabilité à porter.
On honore des gens qui ont fait de grandes choses pour notre pays et localement.
C'est quelque chose qu'il ne faut pas entacher », renchérit Jules.
Membres du club histoire de leur collège de La Loupe, ces deux élèves connaissent Raymond Dutertre. Ce dernier continue inlassablement de témoigner auprès des jeunes pour ne jamais oublier combien la paix d'aujourd'hui a été acquise chèrement et douloureusement. Député, sous-préfet et maire déposent des gerbes devant le monument aux morts.
Un devoir...
Pas de mélancolie chez cet Eurélien, « heureux d'être là », pour se souvenir des camarades, prêts à tous les risques, y compris y laisser la vie, pour libérer le pays des soldats nazis.
Et de balayer tout héroïsme derrière ce qu'il décrit comme leur devoir : « Si on ne l'avait pas fait, ce serait arrivé quand même," dit-il, en pensant au débarquement des Alliés qui avait eu lieu quelques jours avant, sur les plages de Normandie...
" Mais c'était bien de les aider, on n'allait pas rester derrière à les regarder et les applaudir !
Il fallait bien qu'on fasse notre petite part, nous aussi !"
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